L’instance judiciaire a renvoyé le dossier pour que Pinar Selek soit condamnée, en vertu de l’article 125 de l’ancien Code pénal turc qui prévoit la réclusion à perpétuité aggravée contre l’accusée.
Le 6 janvier 2023, la cour d’Istanbul délivrait une assignation au ministère de la Justice, afin qu’un mandat d’arrêt international soit lancé contre Pınar Selek. Cette dernière est réfugiée en France depuis 2011, et a acquis la nationalité française en 2017.
Outre les avocats locaux de l’auteure, ceux des barreaux de Paris et de Marseille étaient présents durant d’audience. L’un d’eux, Me Atalay, indique : « Nous ne sommes pas d’accord. Non seulement pour des raisons de justice et d’équité, mais aussi parce qu’il existe des motifs juridiques d’acquittement. »
Près de 70 Français se sont déplacés pour soutenir Pinar Selek, dont Jean-Luc Romero, venu représenter la ville de Paris en sa qualité d’adjoint. La police turque a empêché toute expression de soutien devant les médias, avant l’ouverture du procès, a déploré l’élu.
Au cours de l’audience, le procureur s’est opposé à la demande des avocats de Pinar Selek, comme on s’y attendait. Il a également appelé le tribunal à attendre l’exécution du mandat d’arrêt international émis contre la sociologue. Requêtes acceptées : le tribunal a ainsi ajourné le procès jusqu’au 29 septembre 2023.
Un acharnement
En attente de son jugement, elle est libérée une première fois en 2000 grâce à un rapport qui attribua l’explosion meurtrière à une fuite de gaz. La Coordination européenne des collectifs de solidarité avec Pinar Selek va plus loin : Ankara aura fabriqué « de toutes pièces les éléments voulus pour démontrer contre toute évidence la survenance d’un attentat, alors que tout a établi que l’explosion du Marché aux épices d’Istanbul de 1998 a été provoquée accidentellement ».
Dernièrement acquitté en 2014, son dossier fut renvoyé devant la Cour suprême du pays qui prononça une condamnation en juin 2022. Une décision qui ne lui fut officiellement communiquée que le 6 janvier 2023 seulement, soit six mois plus tard.
Féministe, antimilitariste, sociologue, écrivaine et militante, Pinar Selek a subi l’emprisonnement et la torture, parce qu’elle réalisait des recherches sociologiques sur les Kurdes, devenant une cible des autorités.