À moins un an de la fin de son premier mandat à la tête de la Fecafoot, Samuel Eto’o président de l’instance anticipe déjà sur l’avenir à son profit. Président depuis le 11 décembre 2021, la star a suffisamment pris goût à l’exercice de ses fonctions de numéro un du football camerounais pour désormais rêver non seulement d’un deuxième mais aussi, déjà, d’un troisième mandat.
Lors de l’Assemblée générale de la Fecafoot du 15 novembre dernier, le nombre de mandats possibles du président de la Fecafoot et des membres du Comité exécutif (Comex) de l’instance a curieusement été modifié au profit de Samuel Eto’o et son exécutif actuel.
La manœuvre d’Eto’o…
Il apparaît dans les nouveaux statuts de la FECAFOOT que son président a manœuvré pour changer la durée du mandat qui était limité à quatre ans renouvelable une fois. Soit un maximum de huit années. Désormais, c’est quatre ans renouvelables deux fois, soit 12 années au total.
S’il venait à être réélu deux fois consécutivement, Eto’o garderait ainsi les commandes de la Fecafoot jusqu’en 2033. Ceci s’inscrit dans la continuité des ambitions de la star, qui s’est déclarée candidat à la vice-présidence de la Confédération africaine de football (CAF) en marge de la dernière Assemblée générale de la Fecafoot.
Le tripatouillage de la « constitution » de la fecafoot
Mais, il y a plus, Samuel Eto’o a fait modifier l’une des dispositions qui empêchait sa nouvelle candidature à la tête de la FECAFOOT.
En effet, lors de l’arrivée de Samuel Eto’o à la FECAFOOT en décembre 2021, les statuts indiquaient que pour être candidat au comité exécutif dont est membre le président de l’institution, il faut « n’avoir pas été condamné à une peine définitive privative de liberté sans sursis supérieure à trois (03) mois ; d) n’avoir pas été condamné à une peine définitive privative de liberté assortie de sursis simple ou avec probation supérieure à six (06) mois ». Il apparaît ici que depuis des décennies jusqu’au départ de Seidou Bombo Njoya, toute personne condamnée dans les conditions prévues ne pouvait être candidat au comité exécutif de la FECAFOOT et par ricochet à la présidence.
Sauf que les mésaventures personnelles de Samuel Eto’o vont changer la donne. Nous sommes en juin 2022. Après plusieurs années d’enquêtes, Samuel Eto’o est condamné à 22 mois de prison ferme pour fraude fiscale. Il a été reconnu coupable d’avoir caché 3,8 millions d’euros entre 2006 et 2009 au Trésor public espagnol lorsqu’il évoluait au FC Barcelone.
Suite à cet évènement, Samuel Eto’o, sur la base des statuts de la FECAFOOT, ne pouvait plus rester à la tête de l’institution et par ricochet envisager une nouvelle candidature. Guibai Gatama, membre du comité exécutif de la Fecafoot va saisir le TAS à cet effet. Le TAS dans sa sentence, consacrera la déchéance de la présidence de la Fecafoot mais renverra l’application de cette mesure à l’Assemble générale de la Fecafoot.
Dans les statuts publiés en novembre 2024, il est désormais indiqué : Article 24 sur la désignation des délégués : « Ne peuvent être délégués à l’assemblée générale les personnes condamnées à une peine définitive privative de liberté assortie d’un titre de détention ». Or ce sont les délégués qui votent à une Assemblée générale élective de la FECAFOOT. Article 36 sur les conditions d’éligibilité, il est indiqué que tout candidat au poste de membre du comité exécutif de la FECAFOOT parmi lequel le président doit remplir les conditions d’éligibilité ci-dessous : en alinéa b : « n’avoir pas été condamné à une peine définitive privative de liberté assortie d’un titre de détention ».
Il apparait dès lors que les nouveaux statuts de Samuel Eto’o ont explicitement introduit l’aspect « titre de détention » c’est-à-dire, avoir fait de la prison.
« C’est une véritable hérésie… »
Pour le journaliste lanceur d’alerte Boris Berthol, c’est une véritable hérésie.
Car selon lui si en Espagne, Samuel Eto’o n’avait pas fait de la prison, c’est simplement parce que les condamnations inférieures à deux ans en Espagne peuvent faire l’objet d’aménagement de peine en cas d’attente avec le tribunal. C’est ce qu’a fait Samuel Eto’o et cela n’enlève rien au fait qu’il ait été condamné à une peine définitive ferme.
Il ajoute : « Dans la nouvelle configuration, un candidat à la prochaine élection peut avoir été condamné à une prison ferme rendue définitive par la Cour suprême, mais aussi longtemps qu’il serait caché à Mvog-Ada, il pourrait envoyer un huissier déposer sa candidature, laquelle serait déclarée recevable puisqu’il n’est pas encore en prison ».
Le journaliste s’interroge en suite : la grande question demeure dans le football ou globalement dans le sport, quelles sont les valeurs mises en avant ? La morale, l’éthique ou le banditisme ?