L’Organisation des nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) définie la liberté artistique comme « la liberté d’imaginer, de créer et de distribuer des expressions culturelles diverses sans censure gouvernementale, interférence politique ou pressions exercées par des acteurs non étatiques. » La Convention de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions confère aux œuvres artistiques et partants aux artistes un ensemble de prérogatives, protégées par le droit international.
Il s’agit notamment, du droit à la liberté de circulation, du droit à la liberté d’association, du droit à la protection des droits sociaux et économique et du droit à la participation à la vie culturelle pour ne citer que ceux là.
Au lendemain de l’élection présidentielle du 07 octobre 2018 au Cameroun, de nombreux activistes de la diaspora camerounaise, ont engagé une campagne de boycott de certains artistes à qui ils reprochent d’avoir apporté leur soutien au président Paul Biya, au pouvoir depuis le 06 novembre 1982. Les premiers concernés par cette campagne, sont ceux qui ont pris part au grand concert de soutien à Paul Biya, alors candidat. Concert organisé le 06 octobre 2018 au Palais des Sports de Yaoundé.
La première victime de cette campagne odieuse, c’est la chanteuse de Bikutsi (Rythme traditionnel de la région du centre Cameroun) K-Tino, dont le concert prévu à Paris le 31 octobre de la même année sera annulé. Deux jours plus tard, Ben Decca, chanteur de Makossa (Rythme traditionnel de la région du Littoral Cameroun) se verra à son tour interdit de se produire en région parisienne. Coco Argenté, chanteuse de Bekutsi se verra elle aussi interdite de prestation en Europe. Le mouvement va même s’étendre hors du vieux continent. Les artistes « Indésirables » sont interdits de spectacles aux Etats-Unis, en Asie et même sur le continent. Des étudiants camerounais vivant au Sénégal s’étaient opposés à l’arrivé des artistes dits « Sardinards » au pays de Léopold Sédar Senghor.
Cinq ans après la réélection du président Paul Biya, la campagne de boycott de certains artistes par les éléments de la brigade Anti-Sardinard (Bas) se poursuit. Le dernier exemple est le concert des frères Deca prévu le 14 avril 2023 en Allemagne, et finalement annulé du fait des menaces de la Bas.
Au même moment des artistes reconnus proches du bord idéologique du Professeur Maurice Kamto, opposant au régime de Yaoundé se produisent sans problème en occident. C’est le cas du rappeur Valséro qui lui bénéficie au demeurant du soutien inconditionnel de la Bas. Comme lui, la chanteuse de Bikutsi Lady Ponce se produit en toute impunité.
La Bas qui se réclame être un mouvement laïc et apolitique ne cache-t-elle pas mal son caractère partisan ? Aussi, ne fait-elle pas par son activisme entorse au droit international qui stipule que « la diffusion de la création artistique est libre » ? Au demeurant, c’est la liberté artistique des camerounais qui est assassinée par une cohorte de fanatique, qui rajoute une couche sombre sur le mouvement culturel camerounais déjà grippé.