Cette action judiciaire fait suite à la parution en 2019 par Charles Onana, chez L’Artilleur, du livre Rwanda, la vérité sur l’opération Turquoise, qui a suscité une plainte de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), de la Ligue des Droits de l’Homme et de l’association Survie. Depuis janvier 2017, la loi française sanctionne la négation, la minimisation ou la banalisation des génocides reconnus par l’État. Au cours du procès, l’avocat du procureur a dénoncé l’approche de Onana comme « insuffisante et incorrecte » car elle « omet intentionnellement la finalité [du génocide, NdR] : la destruction totale ou partielle du groupe tutsi », selon l’AFP. Selon cette dernière, l’écrivain avait clairement dépassé les limites de la liberté d’expression en minimisant et en banalisant l’existence du génocide de Tutsis.
Sabrina Goldman, avocate de la Licra, a interprété l’utilisation fréquente des guillemets par Onana autour du mot « génocide » et ses références à ce terme comme un « dogme » ou une « idéologie » comme du « négationnisme pur et simple ». L’avocat de la défense, Me Emmanuel Pire, s’est montré déçu par le verdict. Auprès de RFI, il a mis en évidence que son client ne « remet pas en question le génocide des Tutsis décrit dans son livre, mais qu’il le « remet dans le contexte historique approprié ». Il a annoncé à la fin de l’audience qu’il allait faire appel de cette condamnation au nom de son client. Charles Onana remet en question plusieurs aspects reconnus du génocide, en décrivant notamment sa planification comme une « thèse conspirationniste » et même comme « l’une des plus grandes tromperies du XXe siècle ». L’écrivain soutient aussi l’opération Turquoise, une opération française menée par l’ONU, souvent critiquée pour avoir contribué, entre autres, à la fuite des génocidaires vers le Zaïre, aujourd’hui la République démocratique du Congo. Il soutient que Paul Kagame, alors chef du Front patriotique rwandais et aujourd’hui président du Rwanda, aurait mis en place un « plan » dès 1990 pour s’emparer des ressources minières du Nord-Kivu, et accuse le Front patriotique rwandais (FPR) d’être le véritable « responsable et organisateur » des massacres.
Son ouvrage remet aussi en cause l’utilisation du mot « génocide » pour désigner les massacres, affirmant que les violences étaient commises aussi bien par les Hutus que par les Tutsis, ce qui rend floue la distinction entre agresseurs et victimes. Le 22 juin 1994, la résolution 929 du Conseil de sécurité de l’ONU avait permis le déploiement d’une force multinationale française au Zaïre et au Rwanda. Il s’agissait d’apporter une contribution impartiale à la sécurité et à la protection des déplacés, des réfugiés et des civils en danger au Rwanda. La France et les militaires français sont accusés de participation à la préparation et à l’exécution du génocide depuis plus de vingt ans par des ONG, des chercheurs et le régime du Rwanda.