in ,

Christine Mbengono: « Il faudrait une politique culturelle assez forte au Cameroun »

Qualité des œuvres musicales, professionnalisme des artistes, communication et marketing…l’entrepreneure culturelle s’exprime sur la musique camerounaise dans le cadre de la 3ème édition du Yaoundé Music Expo (YAMEX) qui se tient du 22 au 25 mars 2023.

Les Rencarts : Doit-on rougir de la musique qui est produite au Cameroun ?

Christine Mbengono : Il n’en est rien. Que ce soit en termes de rythme, de talent ou de vision, il y a tout au Cameroun. Il ne faut absolument pas avoir honte de la musique au Cameroun.

Et pourtant les scores de la musique camerounaise ne sont pas satisfaisants. Les disques se vendent difficilement, le public local boude ses musiciens, l’industrie musicale qui ne s’exporte que très rarement…

Tout ce que vous relevez ne dépend pas seulement de la musique. Il y a plusieurs paramètres qui rentrent en compte, à l’instar de la politique culturelle au Cameroun. Pour que la musique camerounaise puisse mieux s’exporter et se vendre davantage, il faut, au-delà de toute la préparation que font les artistes et tous les autres professionnels, une forte impulsion du gouvernement. Il faudrait une politique culturelle assez forte. Je prends l’aspect des politiques sur les quotas. Il faudrait qu’elles soient revues, que l’on mette un peu plus en vitrine les productions des artistes locaux, et qu’il leurs soit possible de montrer ce dont ils sont capables. C’est une affaire de tous. Les responsabilités sont partagées.

Vous parlez de volonté politique. Avez-vous le sentiment que les politiques au Cameroun sont particulièrement friands de la musique telle qu’elle est pratiquée au Cameroun ?

Oui et non. Oui parce qu’on voit de plus en plus de musiciens invités à des évènements tenues par les officiels de la République. Non parce qu’au-delà de ces simples invitations, il faut soutenir réellement l’artiste dès la base. Il ne faut pas attendre le produit fini et l’acheter. Il faut soutenir l’artiste à partir du moment où il veut vivre de son art. Il faut commencer par là. Une fois que c’est fait, je pense que beaucoup de choses se feront naturellement et le Cameroun, par la force des choses, sera à nouveau sur le toit du monde.

Il existe cette querelle de tous les jours au Cameroun entre les « anciens » et les « modernes ». Les premiers déplorent la paresse et le manque d’engouement des seconds ; et ces derniers accusent leurs ainés de ne rien leurs transmettre et sont rarement favorables à d’éventuelles collaborations. Quel est votre avis ?

La vérité est qu’il faut s’adapter, en matière de musique ou dans n’importe quel autre domaine de la vie. Quand on a un produit de qualité, il est difficile d’avoir ce problème de « moderne » et d’ « ancien ».  La majorité des grands hits aujourd’hui sont issus de la fusion de ce que les anciens ont fait et de la part des jeunes. Vous verrez que beaucoup d’artistes ont enrichi leurs compositions de l’héritage musical des ainés. Je vous prends l’exemple de Krys-M qui a mis du Mangambeû (Rythme musical pratiqué dans la région de l’Ouest du Cameroun, NDLR) dans ses chansons tout en utilisant un langage jeune; d’où le succès qu’elle connait depuis peu.  Il faut en effet des musiques qui parlent à toutes les générations.

Un autre débat au Cameroun porte sur la qualité des œuvres musicales. Il y en a qui constate le peu d’application des artistes d’aujourd’hui. Cette qualité qui a existé avec Manu Dibango, Pierre Tchana et autres Eboa Lotin mais que beaucoup recherchent désespérément dans les chansons actuelles…

Vous permettrez que je vous réponde par une question : vous écoutez quel artiste camerounais ? Si votre réponse est aucun, je vous invite à changer de fréquentation.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Taphis: « Nous travaillons pour porter la musique camerounaise à l’international»

Science et Culture : Science Slam 2023 est lancé