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États-Unis : sous Trump, la censure des livres devient une “infox”

Le retour de Donald Trump à la présidence des États-Unis suscitait des inquiétudes parmi les bibliothécaires et, de manière plus large, au sein de nombreux intervenants dans le domaine du livre et de la lecture, redoutant une période sombre. Les débuts du second mandat du milliardaire suscitent plus que des inquiétudes : le ministère de l’Éducation affiche son approbation pour les censures d’ouvrages qui rongent la nation américaine depuis plusieurs années.

En ce qui concerne la possibilité d’un second mandat de Donald Trump qui pourrait être pire que le premier, son retour à la Maison-Blanche risque de fournir des réponses inquiétantes. Suite au salut nazi d’Elon Musk et à une série d’annulations de décrets, l’équipe du 47e président américain a commencé à agir. Au ministère fédéral de l’Éducation, dirigé par Linda McMahon, une milliardaire qui a été vice-présidente de la fédération nationale de catch, le processus de réécriture de l’histoire contemporaine a débuté en grande pompe. Selon une déclaration de presse publiée le 24 janvier, le ministère annonce « la fin de la désinformation de Biden concernant la censure des livres ».

Cette expression, très prisée par le parti républicain, notamment Ron DeSantis, le gouverneur de la Floride, a pour but de déconsidérer toutes les objections formulées contre les mesures de régulation des livres dans les bibliothèques publiques et scolaires. Ces lois, qui ont été instaurées dans plusieurs États, limitent l’accès aux livres sous le prétexte de protéger les mineurs contre ce qui est considéré comme « obscène » ou « pornographique ». Cependant, ces mesures et leurs défenseurs demeurent délibérément flous dans leurs modalités de mise en œuvre, ce qui permet d’inclure des textes traitant de sujets cruciaux tels que les violences sexuelles, les relations amoureuses entre personnes de même sexe, les violences à l’égard des femmes ou des individus racisés, voire l’histoire américaine et ses aspects les plus sombres.

De plus, ces lois mises en place en Floride, Arkansas, Texas, Géorgie, Utah et Iowa, entre autres, pénalisent les bibliothécaires, et parfois même les libraires. Elles négligent délibérément leur compétence pour décider si un livre convient à une tranche d’âge spécifique. Selon l’organisation non gouvernementale PEN America, plus de 10 000 livres auraient été l’objet d’une procédure de censure ou de retrait à l’échelle nationale durant l’année 2023-2024. Ce recueil comprend des œuvres de Rupi Kaur, Margaret Atwood, Sarah J. Maas, Judy Blume, Alice Walker, Lev Grossman, Jodi Picoult, John Green, Patti Smith, Sally Rooney, Anna Todd, Stephen King et également Marjane Satrapi, Pénélope Bagieu ou encore Mirion Malle…

Face à l’expansion de cette censure autorisée dans plusieurs États, le gouvernement fédéral avait lancé certaines actions pour contenir les dommages. En juillet 2023, le ministère de l’Éducation a donc annoncé la désignation d’un « coordinateur responsable de s’attaquer à la menace croissante que représente la censure des livres pour les droits civiques des étudiants ». Il avait surtout engagé une dizaine de démarches pour examiner les méthodes appliquées dans une dizaine d’États, pour juger s’il était pertinent de déposer une plainte, estimant que les restrictions d’accès et la suppression des œuvres contrevenaient aux droits des étudiants. Dans une déclaration publiée le 24 janvier dernier, l’ancien ministère de l’Éducation sous Trump déclare avoir « laissé tomber 11 recours concernant de prétendues “censures de livres” ». L’idée que le retrait des livres pourrait engendrer un « climat hostile pour les étudiants » est même définie comme une « allégation sans preuve basée sur une théorie juridique absurde ». Évidemment, le rôle de coordinateur créé sous l’administration Biden est aussi aboli.

Il n’est pas surprenant que ce soutien indéfectible accordé aux pays qui légalisent la censure des livres soit présent. Linda McMahon a fermement soutenu l’idée que les États devraient avoir la liberté de déterminer leurs propres exigences éducatives et d’élaborer leurs programmes de manière autonome. En ce qui concerne Donald Trump, il adhère au Projet 2025 de la très conservatrice Heritage Foundation, qui combine avec enthousiasme le libéralisme économique et des mesures sociétales restrictives. Ce document, que Trump avait nié soutenir, préconisait notamment de laisser chaque État définir sa propre politique éducative — il soutenait même que le département fédéral de l’Éducation devrait être aboli. Kevin D. Roberts, qui préside cette fondation, exprimait également son opinion que les bibliothèques américaines étaient saturées de « pornographie »…

 

 

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