Les femmes africaines dans des vêtements cousus au fil occidental. Signe des temps actuels où l’africanité s’assume dans des costumes étrangers. Cliché capturé sous le ciel transalpin et retranscrit au moyen du pinceau d’Oroma Elewa. La plasticienne nigériane, scrutatrice de cette diaspora africaine dont elle illustre la subordination au conformisme européen, évoque à travers ses tableaux l’indépendance d’esprit à laquelle s’abreuve le ton de l’Africaine contemporaine face à l’homme, «une certaine liberté d’expression » qui crée « un monde transactionnel où les hommes sont presque des objets », explique-t-elle. La dignité du pagne resté sous les tropiques est un essuie-pieds sur lequel l’ostentation d’un tailleur-pantalon de cadres s’affiche. Ces visages d’un continent rejoignant le concert des nations sans sa partition seront à découvrir à la galerie In Situ Fabienne Leclerc. Des Africaines siliconées aux préceptes de l’outre-manche en vitrine jusqu’au 29 avril.
Une Afrique esquissée avec délicatesse, sculptée avec de l’argile et miniaturée pour le plaisir du regard se donnera aussi à voir à l’Institut des cultures d’islam jusqu’au 16 avril. Dans la posture d’un Pygmalion faiseur d’âmes, le franco-algérien Katia Kameli invite son public à découvrir les créatures du Parlement des oiseaux, conte persan du XIIe siècle. Des sculptures argileuses qui décorent une exposition à travers laquelle s’exprime la culture moyen-orientale dans des parures de circonstances.
Une autre démonstration de la finesse qui particularise l’art africain sera faite par Harouna Ouedraogo et Christophe Sawadogo. Les deux artistes burkinabés ont joint leurs talents aux approches distinctes chez Art-Z au 11è arrondissement de Paris jusqu’au 15 avril. Expressionniste dans ses coups de pinceaux, Harouna peint des visages. Grande passion qu’il badigeonne en grand format avec un zeste de street art au bout du pinceau. Démarche différente de celle de Christophe Sawadogo, fidèle à l’encre sur papier et à ces petits formats à travers lesquels ils figent des « fragments de vie » comme il aime à les appeler.
La galerie Cécile Fakhoury de son côté accueille les toiles du malien Carl-Edouard Keïta. Son œuvre exhume de l’oubli les personnalités noires d’une époque désormais révolu. Des portraits à l’instar de celui de Selika Lazevski, écuyère de cirque dans le Paris de la Belle Epoque, seront exposés jusqu’au 29 avril. Accroché à un mur aussi, un portrait de Battling Siki, champion sénégalais de boxe en France, assassiné en 1922. Tout ce travail s’inspire du cubisme et des révolutions survenues dans les milieux culturels des années 1920 et 1930.
La saison africaine dans les galeries de la région parisienne se poursuit chez Anthony dans le XVIe arrondissement où un regard sera posé sur l’Afrique du sud d’aujourd’hui. Un exercice piloté par Zanele Muholi, la plus connue des quatre portraitistes qui présente une idée de la République Arc-en-ciel en noir et blanc, couleurs sempiternelles du débat politique au pays de Nelson Mandela. A côté, Leila Rose Framer dans un déploiement sculptural au pastel gras où des femmes peintes en noir assument leur teint, Lindokuhle Khumalo qui portraiture la ruralité sud-africaine sur des fonds à la fois unis et verts, où encore Morgan Mahape dont la méticulosité est créatrice de paysages et de portraits sur des rideaux de perles.