Figure majeure de la politique ivoirienne depuis plus 50 ans, Henri Konan Bédié, leader du Parti Démocratique de Côte d’ivoire-Rassemblement démocratique Africain (PDCI-RDA) est mort le 01er Août à Abidjan, à l’âge de 89 ans.
Merci, président Bédié
Président de la république ivoirienne (1993-1999) Henri Konan Bédié tenait encore d’une main de fer les reines de son parti, le PDCI-RDA. Il était aussi l’un des piliers forts de la vie politique du pays. C’est d’ailleurs avec beaucoup d’entrain qu’il préparait les élections municipales et régionales du 2 septembre prochain et le congrès à venir de sa formation politique, en octobre de cette même année 2023. Des étapes décisives pour le PDCI-RDA, dans la perspective l’élection présidentielle de 2025.
Aussitôt sa disparition annoncée, des dizaines de militants de son parti se sont rassemblés dans sa villa du quartier de Cocody. « Je n’arrive pas à y croire. Parce que, avant-hier, j’étais avec lui à Daoukro, on a déjeuné et échangé ensemble, il n’était pas fatigué, il était en pleine forme, on a pris des photos ensemble. On était en train de préparer les élections avec lui, c’est vraiment un coup dur », s’alarme Cyril Yobouet, coordonnateur des mouvements associatifs du PDCI-RDA.
« Je n’y croyais pas, c’est pour ça que je suis venu ici. Nous allons repartir sur le terrain et nous allons demander aux militants de faire en sorte que le PDCI remporte les élections pour rendre ce dernier hommage à notre président », assure pour sa part Innocent Kouamé Kouassi, candidat aux élections municipales dans la ville de Guitry, à 150 kilomètres à l’ouest d’Abidjan.
La présidence de la république ivoirienne, a réagi elle également à cette disparition à la mi-journée, ce mercredi. Dans un communiqué lu par son Secrétaire général, le président du pays, Alassane Ouattara, « rend hommage à son aîné, grand serviteur de l’État, personnalité politique de premier rang et fidèle compagnon du père de la nation ivoirienne Félix Houphouët-Boigny ». Le chef de l’État ivoirien « salue la mémoire d’un grand homme d’État qui avait un amour profond pour son pays, et qui a servi avec dévouement tous les postes qu’il a occupé ».
Un parcours politique atypique…
Né le 5 mai 1934 dans le village de Dadiékro, au centre du pays, N’Zueba (l’enfant de la pluie, en baoulé) a connu une ascension politique rapide. Dans les années 1960, il s’engage auprès du père de l’indépendance, Félix Houphouët-Boigny (le « Vieux »), au PDCI-RDA, alors parti unique.
A seulement 26 ans, il devient le premier ambassadeur de Côte d’Ivoire aux Etats-Unis et au Canada, (1961-1966). Il revient au pays où il désigné délégué aux Affaires économiques et financières (1966-1968), puis ministre de l’Économie et des Finances (1968-1977) et enfin président de l’Assemblée nationale (1980-1993) sous la présidence de Félix Houphouët-Boigny. Adoubé par le « Vieux », il assure l’intérim de la présidence de la République, en tant que président de l’Assemblée nationale lorsque celui-ci meurt.
Henri Konan Bédié ne jouit pas du charisme et de l’aura de son prédécesseur et se retrouve rapidement accusé de répression politique et de corruption. Il va exciper l’idée de l’ivoirité, notion selon laquelle pour candidater à l’élection présidentielle, il faute être né d’un père et d’une mère d’origine ivoirienne. Cette notion de l’ivoirité permet notamment d’écarter son principal rival, Alassane Ouattara, à l’élection présidentielle ivoirienne de 1995, scrutin au terme duquel, il est élu avec 96,44 % des suffrages, tous les autres candidats, à l’exception de Francis Wodié (Parti ivoirien des travailleurs), ayant boycotté l’élection à cause de la réforme controversée du code électoral autour de la notion d’ivoirité.
Le mandat du président Bédié est émaillé par de nombreuses crises, économiques et politiques notamment. Une mutinerie dégénère en un coup d’État militaire le 24 décembre 1999 et le président Bédié doit quitter son palais en catastrophe à bord d’un hélicoptère de l’armée française. Robert Guéï s’installe à la Présidence.
Malgré de nombreux autres essais, le Sphinx de Daoukro ne briguera plus la magistrature suprême en Côte d’ivoire.