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Le Goncourt 1960, écrit par un partisan de Hitler, va faire l’objet d’une nouvelle édition

« Dieu est né en exil », une œuvre de l’écrivain roumain Vintila Horia, fera l’objet d’une nouvelle publication le 10 avril. Lauréat du Prix Goncourt en 1960, il avait précédemment exprimé son inclination pour Adolf Hitler.

Personne parmi le jury du prix Goncourt 1960 n’avait idée que le lauréat, le Roumain Vintila Horia, avait autrefois exprimé son affection pour Adolf Hitler. Le scandale est en grande partie tombé dans l’oubli, et le livre va être à nouveau publié. Selon un plan de publication transmis aux médias lundi, Dieu est né en exil  sera réédité le 10 avril par les Éditions Noir sur blanc. Dans sa collection « La Bibliothèque de Dimitri », cette maison d’édition réimprime le vaste catalogue de littérature étrangère publié par Vladimir Dimitrijevic, un Yougoslave exilé qui a fondé les éditions L’Âge d’Homme à Lausanne, en Suisse, en 1966. Dieu est né en exil a connu trois publications : la première édition en 1960, publiée par Fayard, une réédition initiale en 1981 chez Famot à Genève (établie par un ami de Jean-Marie Le Pen), suivie d’une seconde réédition en 1988 chez L’Âge d’homme en Suisse et De Fallois en France.

L’exil imaginaire du poète romain Ovide à Tomes, aujourd’hui connue sous le nom de Constanta, sur les rives de la mer Noire en Roumanie, a été largement éclipsé par la controverse entourant son auteur. À l’époque, il était un écrivain presque méconnu de 44 ans, qui s’exprimait en trois langues : roumain, français et espagnol. « C’est un magnifique ouvrage. Un texte vraiment, vraiment vaste », a déclaré Marko Despot, l’éditeur de Noir sur Blanc, lors d’une interview avec l’AFP. Il le met en parallèle avec un roman de 1951 désormais plus connu : Mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar. Horia a gagné six des dix voix au prix Goncourt le 21 novembre 1960. Quatre jours plus tard, L’Humanité sort un article intitulé : « Antisémite pro-hitlérien : voilà le gagnant du Goncourt 1960 ».

Le journaliste et auteur communiste André Wurmser possède la traduction de passages d’articles rédigés par Vintila Horia dans des publications roumaines de droite ou d’extrême droite. Dans l’un de ses écrits de 1940, Horia exprime sa satisfaction face à l’invasion de la France par l’Allemagne, qu’il considère comme le seul événement capable de permettre une renaissance. Dans une autre déclaration de 1935, il fait l’éloge des gouvernements fasciste d’Italie et nazi d’Allemagne, qui « ont finalement réussi à se défaire du filet du judaïsme ». Marko Despot n’est pas d’accord. Selon lui, quiconque adhère à une idéologie se fourvoie. « Je suis à l’instar des éditions Gallimard, qui s’abstiennent de publier celle de Céline », a-t-il rétorqué. Louis-Ferdinand Céline, figure majeure de la littérature française du XXe siècle, était un fervent antisémitisme durant les années 1930-40, un ardent défenseur de la collaboration avec l’envahisseur nazi. « L’individu peut être d’une grande bêtise, et l’auteur un génie. Je considérerais cela regrettable qu’on attribue à un auteur décédé des reproches pour son passé. J’aimerais que l’on porte un jugement sur le roman », ajoute l’éditeur suisse.

À l’époque où elle ne recevait le lauréat que quelques semaines après son vote, l’Académie Goncourt a choisi de ne pas convier le Roumain à son banquet.Dans le classement, le prix de 1960 est une situation exceptionnelle, « décerné mais non attribué ». Dans un document de recherche en 2016, une chercheuse roumaine nommée Alice Popescu a résolu le cas de cet écrivain en s’appuyant sur les archives du régime roumain des années 1960 et de la presse des années 1930-1940. En effet, Horia s’est adonné à des diatribes antisémites à une période où elles étaient courantes. Toutefois, elle affirme que « nulle part dans l’œuvre de Vintila Horia, on ne peut déceler la moindre trace d’antisémitisme ou de fascisme ».Horia avait défendu sa position de manière peu habile dans France Soir : « Je ne comprends pas pourquoi on se penche sur des éléments aussi anciens ». Il se montra aussi discret que possible, vivant alors en Espagne. Après le décès de Franco en 1975, les éditions Fayard se sont interrogées sur sa survie. La confirmation ne leur est parvenue qu’en 1992, lorsque un hôpital de Madrid a annoncé son décès.

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