Sankara, Mandela, Malcom X, Muhammad Ali, Marcus Garvey, Kadhafi, Nkruma, Steve Biko ou encore Patrice Lumumba sont des figures importantes de la lutte contre la discrimination raciale et la colonisation. Panafricanistes jusqu’au bout des doigts, ses africains et afro-descendants étaient tous habités par un rêve, celui de voir les fils du continent et de sa diaspora unis autour du même sentiment de fierté pour le passé et les valeurs africaines. Né au début du XXe siècle dans les milieux intellectuels afro-américains et antillais, le panafricanisme va rapidement être porté par les leaders politiques dès la décennie 1950 sur le continent. Un des chantres les plus percutants de ce courant idéologique c’est sans aucune contestation, le ghanéen Kwame Nkruma qui porte le projet de l’unité africaine.
Sous son impulsion, l’Organisation de l’unité africaine (OUA) est créée le 25 mai 1963 à Addis-Abeba en Ethiopie. Trente-deux chefs d’Etats et de gouvernements africains prennent part aux travaux. Le but recherché par l’organisation est de faciliter l’union et la solidarité entre les pays membres pour parachever la décolonisation et se libérer du racisme de l’apartheid. Un projet qui se heurte à de nombreux écueils, notamment, les manœuvres des puissances coloniales et les enjeux de la guerre froide.
Le projet d’unité de l’Afrique et de sa diaspora éventré…
Deux idéologies s’opposent lors de la création de l’OUA. Kwame Nkrumah, plaide en faveur d’un fédéralisme continental, d’une Union des États africains, d’un corps diplomatique continental, d’un ministère de la Défense et d’un marché commun. Il est farouchement combattu par ses pairs qui défendent à corps et à cri leur souveraineté. Mis en minorité, sa vision sera finalement battue en brèche.
L’OUA est finalement créée avec pour ambition, de soustraire les peuples africains du joug coloniale pour leur permettre de déterminer leur destin et de réaliser leurs propres aspirations. Une mission complexe, car en effet, elle hérite d’un espace dont les frontières ont été délimitées par les puissances colonisatrices au mépris des réalités sociales, culturelles et d’organisation du pouvoir politique des différents peuples africains.
Très vite, l’OUA fait face à de nombreux conflits frontaliers qu’elle est appelée à résoudre. Le premier éclate en octobre 1963 et oppose le Maroc à l’Algérie. Rabat revendique sa propriété sur une partie du Sahara. Un an plus tard, des conflits analogues éclatent entre la Somalie et l’Ethiopie d’une part, et entre la Somalie et le Kenya d’autre part. La multiplication des conflits liés à la contestation des frontières héritées de la colonisation va conduire l’OUA à adopter une règle juridique consacrant la reconnaissance des frontières héritées de la colonisation. Cette règle a été adoptée par une déclaration de la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement tenue au Caire en date du 31 juillet 1964.
Plutôt que d’ouvrir les frontières pour faciliter l’intégration entre les peuples et faciliter les échanges, les pays membres vont se replier sur eux et ériger des barrières au plus grand bonheur des puissances colonisatrices. Au final, l’OUA restera jusqu’à sa disparition le 09 juillet 2002, une organisation intergouvernementale qui ne parvint pas unir les peuples d’Afrique et de sa diaspora, mais qui surtout n’a pas vraiment réussi à débarrasser les Etats africains du joug des anciennes puissances colonisatrices.
L’armée pour libérer le continent ?
L’actualité récente dans de nombreux pays du sahel (Mali, Burkina Faso et Niger) en dit long sur la volonté des peuples africains à rompre avec les anciennes puissances colonisatrices. Dans les trois pays susmentionnés, le pouvoir est entre les mains des militaires arrivés à la magistrature suprême après des coups d’états.
Au Mali, le Colonel Assimi Goïta, président de la transition après avoir démis le président élu Ibrahim Boubacar Keïta le 18 août 2020 promet de « mettre tout en œuvre pour la réalisation de l’unité africaine ». Même discours au Burkina Faso, où le Capitaine Ibrahim Traoré, arrivé au pouvoir le 30 septembre 2022 promet de lutter pour une « indépendance totale » du pays des hommes intègre. Pour lui, le Burkina est encore sous le joug du colon français. « Notre indépendance n’est pas acquise parce que nos terres sont occupées » a-t-il déclaré. Au Niger, depuis le coup d’Etat perpétré par le Colonel Ibroh Amadou le 26 juillet 2023, les manifestations appelant la France à quitter le pays se multiplient. Pour le président de la transition, « le combat ne s’arrêtera que le jour où il n’y aura plus aucun militaire français au Niger ».
La solution pour libérer l’Afrique du joug coloniale passera-t-elle par la force militaire ? La question se pose aujourd’hui avec acuité.
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